Mai 68: des chansons captent l'air du temps
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Les turbulences de Mai 68 ont inspiré
plusieurs chanteurs dont Nougaro, Ferrat, Thiéfaine
ou Ferré. Quelques tubes marquent néanmoins
cette période agitée, dont l'emblématique
«Il est cinq heures, Paris s'éveille»
de Dutronc.
A la fois joyeuse et désenchantée, la chanson
sort en avril. Elle décrit la Ville lumière
d'après fête, parle d'ouvriers déprimés
et de gens brimés sur les notes d'une flûte
guillerette.
La mélodie devient le premier hymne des manifestants
qui en actualisent cependant les paroles. «Les 403
sont renversées, la grève sauvage est générale.
Les Ford finissent de brûler, les enragés
ouvrent le bal. Il est cinq heures... Paris s'éveille,
Paris s'éveille», chantait Jacques Dutronc.
Dans l'effervescence des affrontements, la parole se libère.
Les participants martèlent des slogans libertaires
et entonnent des chants prolétariens, dont l'Internationale
et des couplets de la jeune chanteuse engagée Dominique
Grange. D'autres reprennent la toute première chanson
de Renaud: «Crève salope». Le futur
chanteur vedette l'interprète à la Sorbonne,
puis des lycéens parisiens adoptent ce titre qui
tire sur l'autorité parentale, policière
ou religieuse.
Dès la mi-mai, des musiciens viennent jouer gratuitement
dans les usines françaises qu'occupent les ouvriers.
Le mouvement de grève s'amplifie et paralyse bientôt
le pays. En juin pourtant, avec le retour au calme et
la reprise du travail, paraît une ritournelle qui
va faire polémique: «Petite fille de Français
moyen» de Sheila.
Les nostalgiques des barricades s'étranglent de
l'entendre chanter les valeurs traditionnelles qu'ils
contestent. Certains dénoncent cet opportunisme
politique.
L'agitation de 68 inspire plusieurs chansons dans les
mois qui suivent, dont «Paris mai» à
Claude Nougaro. Outre-Manche, cette année-là
les deux groupes phares publient chacun un titre influencé
par les violences parisiennes: «Revolution»
pour les Beatles et «Street Fighting Man»
pour les Rolling Stones.
D'autres artistes francophones en font témoignage.
Ce sont par exemple «L'été 68»
et «Paris, je ne t'aime plus» de Léo
Ferré, «Le temps de vivre» de Georges
Moustaki, «Au printemps de quoi rêvais tu?»
de Jean Ferrat ou «Nous sommes le pouvoir»
de Colette Magny.
Durant les années 70, quelques titres ravivent
cette période troublée dont «Mai 68»
de Jean-Michel Caradec, «22 mai» de Hubert
Félix Thiéfaine. Gilbert Bécaud enregistre
en 1980 «Mai 68», une chanson d'amour. Des
précurseurs 1968 semble marquer le retour de la
chanson engagée ou politisée.
Pourtant en France, comme ailleurs, on conteste en chantant
depuis des siècles. Sans remonter jusqu'au «Ah!
ça ira» surgi en 1790 ou à «La
Marseillaise» en 1792, il faut signaler quelques
chanteurs chevelus et insolents préfigurent en
1966 la révolte de 68: Antoine avec «Les
élucubrations» et Michel Polnareff avec «L'amour
avec toi» pour ne citer qu'eux.
Les Romands
En mai 68, Henri Dès est à Paris. A l'époque
chanteur pour adultes, il se sent plus proche d'un Georges
Brassens ou d'un Guy Béart alors que le public
réclame des chansons engagées. Les disques
du Vaudois se vendent donc mal.
A l'époque, l'instituteur Michel Bühler était
encore chanteur amateur. Le Vaudois est choqué
de découvrir les barricades encore fumantes lorsqu'il
se rend à Paris pour récupérer des
amis bloqués par la grève générale.
«Je me suis dit qu'il devait exister des moyens
moins violents de régler les conflits», a-t-il
raconté.
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Le hit-parade de Mai
68
en Suisse |
Tom Jones s'impose avec «Delilah» devenu
depuis un hymne de fans de foot et de rugby. |
Louis Amstrong obtient un énorme succès
en Suisse comme à l'étranger avec son slow
«What A Wonderful World». |
Les Helvètes plébiscitent aussi les chansons
britanniques, dont «Congratulations» de Cliff
Richard, 2e au Concours Eurovision de la chanson. |
Les Beatles se classent avec «Lady Madonna»
et les Rolling Stones déboulent avec une de leurs
pépites: «Jumpin' Jack Flash». |
Les Moody Blues se maintiennent avec «Nights In
White Satin», sorti en 1967, qui reste un slow emblématique
de l'époque. |
Le palmarès suisse réunit d'autres titres
passés dans le patrimoine de la variété
internationale, tels «The Dock of the Bay»
d'Otis Redding et une sucrerie du crooner anglophone Engelbert
Humperdinck «A Man Without Love». |
Au printemps, le public romand s'enflamme pour les vedettes
françaises Claude François, Johnny Hallyday,
Adamo, Mireille Mathieu ou encore Jacques Dutronc. |
Quant à la Fribourgeoise Arlette Zola, elle réussit
sa percée sur le marché français. |
68, c'est la naissance du chanteur DJ Bobo, du cuisinier
Didier de Courten, du poète Pierre Lepori ou de
la romancière Noëlle Revaz. |
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