Pascal Mayer fête cette année
ses 50 ans. Depuis quelque 30 ans, il se consacre à
la direction de chœur. Il dirige notamment le Pro
Arte de Lausanne, le Chœur de chambre de l’université
de Fribourg, ou encore le Chœur Faller. C’était
l’occasion de lui demander son témoignage
sur la musique contemporaine en Suisse romande.
La création en Suisse romande? On a de la chance.
Nous avons une tradition assez propre à notre région,
plus élaborée qu’ailleurs, qui se
situe entre l’avant-garde et le populaire traditionnel.
Et cela donne une musique contemporaine hors «ghetto»,
à la portée des amateurs comme des plus
exigeants. C’est un élan que l’on doit
à des Abbé Bovet, à des Doret, à
la Fête des Vignerons... La barre a été
mise très haut. Il y a en Suisse romande une ambition
de composer assez forte, et nombreux sont les chœurs
à commander des œuvres.
La musique chorale et celle dite de répertoire
se mélangent ainsi volontiers ici. Et puis, il
y a un soutien de la part de fondations, des cantons.
Une grande politique d’ouverture aussi. J’ai
ainsi créé des œuvres difficiles, très
contemporaines, mais j’ai senti cette ouverture,
qui répond à celle du public. Car ce dernier
ressent une véritable curiosité pour la
musique contemporaine. Certes, j’ai parfois pris
des risques, en choisissant des pièces authentiques,
pas adaptées ou simplifiées. Mais c’est
un travail d’équipe: c’est partager
les doutes du compositeur, ses remises en questions.
C’est capital pour un artiste d’être
intégré dans sa société, de
participer à une aventure de découverte.
Dans mes projets, la musique des XX et XXIe siècles
est de plus en plus présente. Car la musique d’après
1950 n’est pas assez jouée. Je suis aussi
intéressé à participer à la
création du Requiem de Christian Favre. J’aimerais
aussi me lancer dans le Cantique des prisonniers, de Luigi
Dallapiccola, une musique contestataire, un témoignage
sur la résistance au pouvoir.
Et ce mois d'avril 2008, je vais diriger le War Requiem
de Benjamin Britten [lire SympAgenda de février
mars 2008] avec le chœur Faller, le chœur Pro
Arte, la Maîtrise de Saint-Pierre-aux-Liens et le
Sinfonietta. Une pièce très forte, qui m’a
tout de suite convaincu, qui mêle l’absurdité
de la guerre au sens du devoir poussé à
l’extrême.